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Toi de Hélène Gestern (Seuil 2025)

Toi  de Hélène Gestern (Seuil 2025)

Hélène Gestern a très bien fait de raconter son amour pour sa chatte Mimi avant que cette dernière ne meure. Elle la sait condamnée, à cause du diabète et de maladies opportunistes. Et elle a choisi de mettre des mots sur cet attachement indicible et puissant que nous pouvons connaitre par la grâce d’un animal domestique.

Comme mes lecteurs le savent, pour ma part, j’ai perdu ma chatte en mars 2025, suite à une longue et douloureuse maladie. Je crois qu’il faut avoir vécu soi-même cet amour si singulier pour en comprendre la subtilité.

« Ce n’est qu’un animal » : horrible phrase de ceux qui n’ont pas compris.

« Il vaudrait mieux s’occuper des humains dans la détresse que perdre son temps- et son argent-pour un chat ». Voilà souvent ce qu’on entend, comme si on ne pouvait pas s’occuper des deux, comme si les soins qu’on prodigue à notre amie à quatre pattes venaient empêcher toute humanité de s’exprimer.

Je pense au contraire que c’est grâce à cette capacité de compassion que l’on peut être plus attentif aux souffrances humaines. Même si je trouve que les animaux nous donnent cent fois plus qu’un être humain, en termes de confiance, de fidélité, de présence et … d’amour, oui d’amour.

Ma Scarlett à moi venait se blottir contre moi alors qu’elle avait mangé et que sa litière était propre. Elle m’attendait à la porte quand je rentrais tard.

Mais je m’égare dans mes souvenirs, encore très présents, car le deuil est, et restera pendant longtemps, très douloureux. Je reviens à ce beau témoignage de tendresse infinie pour la chatte d’Hélène Gestern.

Le livre est très court, agrémenté de photos noir et blanc de cette merveilleuse créature qui a un jour, fait son apparition dans le jardin de l’autrice et qu’elle a appelée Mimi. Les amoureux des chats le disent tous : le chat est l’expression de ce qu’il y a de plus splendide sur cette terre.  Et ils jurent tous que ce sont les leurs qui sont, de loin, les plus beaux. Parce que nos chats sont magnétiques et qu’ils savent parfaitement bien nous charmer.

« J’ai écrit quelque part que mon amour des animaux est un peu excessif. C’est vrai, et je l’assume. Un jour, dans la rue, j’ai entendu une femme déclarer à son amie, en parlant d’une troisième : « Elle est grave avec son chat. » Je me suis reconnue trait pour trait dans ce diagnostic. Mais j’ai toujours eu des chats et je ne sais pas vivre sans eux. Ils sont pour moi un résumé de la perfection du monde, un condensé de grâce, d’élégance et d’équilibre. Une télé couleur toujours en marche et toujours fascinante.

Ils sont aussi un puits de tendresse sans fond qui a étanché mes peines, absorbé mes solitudes, combattu le vide et fait rempart à l’angoisse qui me mine depuis toujours. »

Je ne dis pas mieux. J’ai adopté un nouveau chat récemment, qui n’a pas du tout la personnalité de Scarlett. Je sais que chaque chat est un petit être singulier, qui certes, partage avec ses congénères des traits de comportement communs, mais possède aussi ses propres habitudes et je dirais, sa propre compréhension du monde. De telle sorte qu’on ne « remplace » jamais l’un par l’autre, mais que l’aventure du lien de confiance est à construire à nouveau, et que nous nous découvrons mutuellement avec le même émerveillement que si c’était la première fois.

Car : « Sa propre personne, on en a vite fait le tour, et la plupart du temps, elle ne se révèle pas d’un intérêt fou. En revanche, on n’épuise jamais le mystère, ni la richesse, d’un être qu’on aime inconditionnellement, et sa capacité à nous métamorphoser en une « meilleure version de nous-même », comme disent les gourous américains du développement personnel. »

Certains disent que nous compensons avec nos animaux favoris des « manques affectifs » et quand il s’agit de femmes, on a tôt fait de parler de « substitut à l’enfant ». Hélène Gestern n’a pas eu d’enfants mais moi oui. J’ai aussi un petit fils que j’adore et que je vois souvent. Lui-même me dit parfois en riant : « mamie, je sais que tu aimes deux personnes à la folie : moi et le chat !! »

« Dans un monde assombri par les guerres, la cruauté, les destructions de toutes sortes […] je ne vois pas ce qu’il y a de répréhensible à prendre soin d’un être vivant, même si cela coûte à tous points de vue. […] Par ailleurs, je n’ai aucun scrupule à dire que, dans ma vie en tout cas, la présence d’animaux de qualité, et en particulier la tienne, a compensé celle de plusieurs êtres humains médiocres. Que j’ai trouvé plus de joie, de sérénité et de plénitude, à partager mes journées avec toi, dans une entente qui ne souffrait aucun nuage, qu’à supporter les palinodies, les fuites et les déceptions dont certains bipèdes font une marque de fabrique.»

Dès lors, la maladie et la mort de notre compagnon à quatre pattes sont, tout autant que pour un être humain qui nous est très cher, un scandale que nous ne pouvons pas envisager.

« La vérité, c’est que nous sommes incapables de penser la mort de ceux que nous aimons.

Toi et moi avons été si solidaires, dans nos adversités respectives, que je pense qu’un morceau de toi a migré en moi et s’y est installé. Peut-être que l’inverse, dans l’immense énigme de l’amour et du vivant est également vrai. Tu es comme un prolongement de mon corps et ta présence tisse la matière même du temps qui est le mien. »

Je me retrouve tellement dans ce qu’écrit Hélène Gestern que tout me revient de notre (courte, mais intense) histoire commune avec Scarlett. Les moments où je me suis inquiétée parce que elle avait disparu chez les voisins (elle semblait désespérée de ne pas pouvoir revenir derrière la grille, mais il a suffi qu'elle entende un bruit derrière elle pour que, paniquée, elle saute dans mes bras), et les moments heureux où elle restait avec moi pendant mes longues nuits….Et cette maladie où je ne pensais qu’à lui éviter les souffrances...peut être sans succès…

Ce livre est un beau témoignage d’amour…et c’est ce qu’il y a de plus solide au monde.

« Car je veux croire qu’en dépit de la dissolution de nos enveloppes terrestres, l’amour ne meurt pas, que c’est même la seule chose qui parvienne à traverser le temps. »

 

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