The Quiet Girl (Film 2023, Irlande)

Pour ceux qui aiment l’action, les films d’aventure, les films à suspens, les émotions fortes exprimées à grands cris, les rythmes rapides, pour ceux qui s’ennuient face à des travellings lents sur des paysages de campagne, pour ceux qui ont horreur des silences, pour ceux qui voudraient retrouver la langue anglaise…bref pour ceux-là qui voient dans le cinéma un moyen d’extérioriser en pleine lumière, passions et sentiments, je déconseille fortement ce film.

Mais si vous voulez savoir ce que c’est que la délicatesse, que la plus grande générosité, que l’amour oblatif, alors ce film vous apportera un moment de grand calme, à la limite de la méditation et de la prière.  Je vais écrire une horreur, mais j’ai bien cru que ce film avait été réalisé par une femme, avant de m’apercevoir que c’est bien un homme qui a su avec autant d'élégance, mettre en scène des relations d’une telle pudeur.

Certes, ce film est extrait d’un livre, livre d’une Irlandaise Claire KEEGAN, qui a certainement pratiqué le « nature writing », tellement elle fait coïncider à la perfection les états d’âme des personnages avec les descriptions des paysages.

Il s’agit de l’histoire d’une petite fille irlandaise, surnuméraire en quelque sorte dans une famille où les enfants naissent à la chaîne, sans qu’on ait bien le temps de prendre en compte leur personnalité, et qui, pour X raisons, est confiée l’espace d’un été chez des cousins sans enfants.

La petite fait pipi au lit, et se caractérise par son mutisme quasi-total. La famille qui la recueille semble très isolée. Cette famille est composée seulement d’un mari et d’une femme, tous deux paysans, avec des vaches, en pleine campagne irlandaise, jamais loin de la mer non plus.

Tous sont des taiseux, et les sentiments les plus vifs ne s’extériorisent jamais en paroles. Il règne dans la maison un silence assez lourd, qui n’est rompu que par les bruits familiers des travaux de la ferme ou des activités ménagères. Mais quoique la maison ne soit pas censée cacher des secrets, il y a bien un mystère qui se révèlera au cours du séjour de la petite.

L’action se passe au début des années 80, et on est encore loin du bouleversement des réseaux sociaux et de l’internet. La lumière est une lumière de fin d’été, chaleureuse et triste, comme fatiguée, sous les frondaisons géantes des arbres centenaires.

Et pour arranger tout ça, les acteurs, et c’est une performance, parlent en gaélique, langue totalement étrangère à tout ce que l’on peut connaitre des langues actuelles en Europe, avec son aspect un peu rocailleux, et ses racines du fond des âges.

Il faut être attentif aux petits détails, même si le film a un rythme très lent, propice à l’endormissement. Amis poètes cinéphiles, citadins qui voudraient s’extraire du temps de la ville, taiseux et introvertis, hyper sensibles et empathiques de tous les pays, ce film est fait pour vous.

Film de Colm Bairéad