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Private Government: How Employers Rule Our Lives par Elizabeth Anderson (Princeton University Press)

Private Government: How Employers Rule Our Lives par  Elizabeth Anderson  (Princeton University Press)

Elizabeth Anderson est une philosophe, professeure à l’Université du Michigan. Elle a publié plusieurs livres sur l’éthique, la démocratie et l’économie. Elle est très reconnue et n’est pas classée parmi les « socialistes » .

Elle publie en 2017 sous le  titre « Private Government: How Employers Rule Our Lives (and Why We Don't Talk about It) » Princeton University Press, une étude sur les conditions de travail aux USA.

Elle nomme « private governement » ,une autorité ou des autorités qui disent aux gouvernés que les règles qui les régissent ne sont pas leur affaire, qu’ils n’ont aucun droit à demander des droits, et que les gouvernants n’ont aucun compte à rendre sur ces règles.  A ce titre, le marché du travail aux US est un gouvernement privé où le public n’a rien à voir.

A l’objection « Mais il y a un contrat de travail », elle répond que le contrat ne garantit en aucune façon que les deux parties soient entièrement consentantes et surtout égales. Elle donne l’exemple des contrats de mariage, qui, dans le passé (le nôtre aussi), n’avaient rien de bien égalitaire et ne garantissaient pas même les consentements mutuels.

La relation employeurs/employés est de la même nature : chacun peut rompre le contrat mais les conséquences sont bien différentes d’un côté ou l’autre. De plus les pouvoirs des  employeurs n’ont rien à voir avec ceux des employés. Ceux-ci peuvent théoriquement renégocier leurs contrats, mais pratiquement leurs marges de manœuvre sont très limitées.

La liberté du travail a un sens particulier aux US où l’esclavage s’est  prolongé longtemps, et , dans une situation de plein emploi, avec de nombreux immigrants (situations des USA pendant le XIXème et XXème siècle) , il était préférable, pour éviter l’exploitation, de reconnaitre la liberté aux employés. Mais pouvoir partir ne garantit pas non plus qu’on soit libre. C’est ainsi que les migrants d’autrefois (elle donne l’exemple des italiens sous Mussolini), ou ceux d’aujourd’hui (qui s’enfuient souvent de pays à feu et à sang), ne sont pas la preuve qu’ils vivaient dans des pays « libres ». La tyrannie, selon Elizabeth Anderson, vient plutôt d’une force asymétrique entre les protagonistes.

Le livre abonde d’exemples d’entreprises qui transforment la vie de leurs salariés en un vrai cauchemar. Le droit de se rendre aux toilettes pendant les heures de travail est un cheval de bataille des relations du travail depuis des dizaines d’années et il n’est pas rare que des travailleurs soient obligés de porter des couches sur la chaîne de montage ou en soient réduits à uriner dans leurs vêtements.

Oui, oui, c’est vrai , et ça se passe actuellement. [1]

« L’emploi de gré à gré » donne aux employeurs le droit de licencier leurs salariés pour n’importe quelle raison, hormis celles qui sont interdites par la loi, comme la discrimination sur la base de la race ou du handicap. Contrairement à l’Europe, il est aussi tout à fait légal pour les employeurs de harceler leurs salariés, tant qu’ils le font sans discrimination. Les salariés abdiquent ainsi la totalité de leurs droits.

Elizabeth Anderson parle, très habilement d’ailleurs, (même si le concept est à mon avis mal utilisé et ne signifie pas autre chose qu’une volonté de provocation), de communisme d’entreprise, c’est-à-dire, pour elle, de tyrannie anonyme. Ceci fait certainement mouche aux USA.

Son livre, qui est un cours en fait, ne conclut pas sur des solutions, même si elle plaide pour une sorte de coopération entre employeurs et employés (comme cela existe en Allemagne finalement). Elle cherche à améliorer la démocratie d’entreprise, deux mots accolés qui font frémir dans bien des cercles actuels.

Je ne sais pas pourquoi je me suis intéressée à cette étude  pendant les vacances.

Private Government: How Employers Rule Our Lives par  Elizabeth Anderson  (Princeton University Press)
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