Il parait que la question est vieille comme le monde, mais je la pose quand même : l’amitié entre un homme et une femme est -elle possible ?
Il y a tant d’univers qui nous séparent qu’à première vue, j’aurais moi aussi répondu que non.
Les études montrent que l’attirance physique est toujours mêlée à l’amitié entre un homme et une femme. Est-il possible que « les études » se trompent ?
J’ai des très proches amis « homme », pas beaucoup, mais quand même !
Je vais faire le portait de l’un d’eux, qui sera l’ami idéal, parce que chacun d’eux porte une étincelle de celui-là.
Nous ne nous sommes pas choisi pour de tristes raisons, parce que l’amour était impossible, et que nous étions résignés. Il n’y a pas d’antipathie physique entre nous, mais pas non plus d’attirance spéciale. Je ne me suis pas entourée d’un ami homme pour éviter les chipies, les jalouses, les garces, et toutes les femmes qui seraient entrées en compétition avec moi. Globalement je n’ai pas de problèmes avec les femmes (enfin avec le genre féminin, je n’aime guère qu’on parle des femmes en général. D’ailleurs je n’ai aucun goût pour les compétiteurs. trices, je ne suis pas du tout attirée par les rivalités ) et j’ai déjà écrit sur ce sujet : j’ai une meilleure amie, je m’entends plutôt bien avec les filles, (reste d’une éducation non mixte) et …je suis féministe (reste d’un passé militant ? respect de soi même ?). Bref je n’ai pas d’ami homme par dépit, par défaut ou par rejet.
Si mon copain garçon est sacré, c’est qu’il est lui aussi, entré dans une amitié par choix, pas par déception, pas par désir contrarié, et pas non plus pour remplacer sa mère. Je ne suis pas sa maman…mais peut-être un peu sa sœur, je ne suis pas son frère, pas sa copine, pas sa moitié, mais son autre au féminin, une espèce singulière, nous sommes l’un pour l’autre à la fois forts et fragiles, nous nous comprenons mais nous ne dépendons pas l’un.e de l’autre.
Comment s’est-on connus ?
Je peux dire qu’on s’est trouvés alors qu’on ne cherchait rien, et l’amitié s’est construite au hasard, au fil du temps. J’ai suivi son mariage, ou son PACS ou sa séparation douloureuse.
J’ai bien aimé ses copines, sa femme, je suis moins en relation avec ses copains. On n’est pas comme des copains, c’est autre chose. J’aime assez les femmes qui l’émeuvent, elles sont en général des anges, des créatures si délicates qu’elles en sont presqu’irréelles. Elles sont sensibles, timides, très intéressées par les arts, elles ont des mains en or, elles chantent ou écrivent divinement, elles sont des championnes des médecines douces, elles savent tout sur les plantes, elles pratiquent le Tai Chi, la naturopathie, la réflexologie, le Shiatsu, la sophrologie….
Malgré toutes ces qualités, il n’arrive pas toujours à les comprendre, il se heurte, -lui qui est presque féminin-, à leur mystère et il en souffre. Jamais ouvertement, il faut deviner, et respecter sa pudeur. Jamais il ne lui viendrait à l’idée de se plaindre mais de temps en temps, quand je lui confie par exemple que je suis devant un malentendu avec mes proches, il lâche : « X, il t’aime comme moi elles m’aiment, les femmes. Elles m’adorent et elles me quittent ».
Et je ne lui dis pas que c’est parce qu’il est trop gentil, parce qu’il s’oublie trop souvent, parce qu’il les admire trop… qu’elles le laissent, fortifiées par son amour inconditionnel, et qu’elles vont chercher ce qu’elles imaginent plus « difficile »…je ne dis rien, ou alors un truc qui fait rire. L’amitié vit de silences…
Sa féminité acceptée par lui-même lui permet de ne pas se heurter, dans les relations sociales, avec les femmes et les hommes dominatrices-teurs. Il est plein d’indulgence et de compréhension pour les les inquiet.e.s, les hautain.e.s, les paranoïaques de tous genres qui peuplent nos vies de travail.
Mais je crois qu’il craque pour de bon devant les farfelu.e.s (comme moi), les artistes, les différent.e.s, les minoritaires, les créatifs.ves.
J’ai suivi sa carrière au travail, ses difficultés avec les patrons, ses succès.
On a toujours tout fêté, parce qu’on se comprend bien dans les bars et les restos : il aime la viande et moi le poisson (ou vice versa), il est dessert, je suis entrées, , nous sommes délicatesse, précaution, attentions, et surtout nous sommes humour tous les deux.
Pour tout ce qui nous arrive, pas besoin de longues explications. Nous sommes là, sans être encombrants.
Il sent quand je ne vais pas bien, j’essaie aussi d’intuiter ses souffrances. Il a le prix d’excellence de l’empathie, il me comprend à demi-mot, il me donne la force de sa présence quand j’ai une aile cassée. Il est capable de partager, mes émotions sont les siennes, il porte les blessures en même temps que moi, c’est plus léger que l’amitié d’une fille, c’est aussi fort.
Il a les mots qui vont droit au but, il SAIT, et il devient pour moi le sage, le discret, le complice et le grand frère qui peut apaiser, consoler, redonner de l’énergie par sa seule présence.
Attention, ce n’est pas un pur esprit non plus et les blagues de potaches sont sa spécialité.
Combien de fois ne l’ai-je pas vu choquer l’assemblée avec des histoires de Carambar ou des jeux de mots ignobles (une caractéristique masculine, les jeux de mots stupides) ! C’est du genre à photographier son z.. avec le téléphone mobile d’une copine mariée à un jaloux pathologique.
Ou à installer une scène de crime autour du bureau d’un collègue, ou encore à tisser des ficelles en forme de toiles d’araignée pour le retour de vacances d’un autre, ou encore à calfeutrer avec du sparadrap l’arrière de la souris d’un troisième larron.
Je l’ai vu écrire tout un journal pour le 1 avril, à pleurer de rire !
C’est aussi lui qui se déguise en éléphant ou en dragon pour la saint-je ne sais pas quoi-, lui qui publie les situations les plus drôles sur FB, lui qui se marre de toutes les situations, lui qui n’hésite pas à interpeller les puissants avec insolence (et sans aucune peur, ni gêne) , qui se révèle un boute-en -train de génie, qui entraine tout le monde dans la désobéissance bon enfant, c’est un leader en âneries !
Il est là, malgré tout, généreux, émotif, silencieux dans toutes les occasions où sa présence est comme de l’eau en plein désert, de sorte que malgré ses pitreries de gosse, c’est pour moi, le top du top, un demi-dieu, celui que je retrouverais certainement au bout de mon chemin ou…ailleurs, si ça existe ! .