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ENC..TA MERE

ENC..TA MERE

Dans le métro, vers la gare du nord jeudi dernier à midi ou presque.

Une femme vient demander des sous, elle commence à débiter son laïus habituel, « Mesdames, Messieurs, c’est pas marrant de rester propre et quelque fois on n’a plus rien à manger. Je m’appelle X et j’ai 32 ans. Je suis à la rue….si vous aviez une petite pièce, un ticket resto ou même des heures de ménage à me donner ».

Je me retourne, elle est jeune effectivement, elle a un ventre de 5 à 6 mois de grossesse, elle est blonde et rose.

Elle ajoute : « Je suis française »….et je me ferme tout à coup. Ce n’est pas parce qu’elle est française que je vais lui donner ou non une pièce mais parce qu’elle est enceinte, qu’elle est minuscule, qu’elle semble fragile. Pourquoi s’est-elle sentie obligée de rajouter qu’elle est française ? Qu’est ce que ça peut me faire à moi, c’est une personne humaine, non ? Et pourquoi il y aurait une hiérarchie dans les personnes vulnérables ?

Elle ne me laisse d’ailleurs pas le temps de réagir et s’assoit sur la banquette dans la rangée à côté de moi pour reprendre son souffle. Je me dis, elle est bien enceinte, on est essoufflées quand on est enceinte de manière un peu avancée comme ça.

Et tout de suite, surgit un homme (peu importe français ou pas, je m’en fiche), qui la menace : « Qu’est-ce que t’as dit ? Hein ? t’as dit que tu enc…ma mère ? tu vas voir comment je vais faire avec toi, répète un peu. Comment ça t’enc…ma mère ? » .

Il commence à lever la main. La fille lui répond : « Eh oui, et toi qu’est-ce que t’as dit sur la mienne de mère ? Hein, la mienne elle est décédée, alors respect ».

Les yeux fous de l’homme semblent surgir de son infini à lui, il va la frapper. Je lorgne vers la sonnette, mais je ne peux pas passer, l’homme encombre le couloir.

La personne assise en face de moi me glisse : « J’ai peur, je voudrais descendre.. »

Bien, moi aussi j’ai peur, mais pas pour moi, je vois bien que je ne suis pas menacée, mais pour la jeune femme apeurée, comment faire pour la protéger ?

Heureusement deux hommes surgissent du fond de la rame, l’un petit, malingre, l’autre un grand "homme de couleur", comme on dit.

C’est le black qui est le plus efficace. Il s’interpose et du haut de son mètre 90, dit très doucement : « Essaie de la toucher, tu vas voir ce qui se passe ».

Le furieux désarme un peu, mais lui demande « qu’est-ce que tu fais là, blaco ? T’es son mec ? »

-«  Non, je la connais même pas, mais c’est une meuf, tu vas pas taper sur une meuf ! ».

Le fou drogué stoppe son manège, il descend au grand soulagement de tout le monde, en continuant de hurler "Tu verras , je vais l'enc..à ta place, ton mec. Je touche pas à une meuf, mais ton mec...à ta place".

La fille semble souffler de plus en plus. Mais je dois descendre moi aussi, je ne lui ai pas donné de pièce et pourtant je l'avais préparée dans ma poche. J'étais sous le choc...

Tristesse ! Même dans la misère, il faut encore que les êtres humains se battent, se menacent, se tuent !

Qu’est ce qu’il y a à envier entre clochards ? Qu’est-ce que c’est que ces insultes à la noix ? Où est l’honneur ? Où se trouve l’humanité ?

Premier enseignement :

On se croirait, toutes proportions gardées dans « Downtown Abbey » où chacun des serviteurs conserve le rang de son maître et est considéré en fonction de la personne à laquelle elle est rattachée. La dame de chambre de la Comtesse est moins bien haut placée que celle de la Duchesse ou de la Marquise !

Et il faudrait que la Française soit mieux protégée que la Tzigane, ou la petite blonde enceinte qui s'essouffle à côté de moi ?

Il y aurait donc des pauvres de qualité supérieure, des clochards de luxe, et d'autres qui seraient des sous-pauvres, des moins que moins que rien?

Deuxième enseignement

Français ou pas, c’est un homme noir qui a su faire face aux insultes, mêmes racistes, de ce fou agresseur.

Que les racistes se le disent, ce n’était pas le "bon noir" du métro, c’était aussi un être humain, qui a pu avoir le sang froid de s’interposer, mais avec grande douceur, et presque de l’empathie. Il a su parler à un drogué, c'est pas donné à tout le monde.

Troisième enseignement

On peut arriver à se débrouiller relativement facilement si ceux qui le peuvent assument et interviennent.

Je ne prétends pas que moi j’aurais pu et que, vis-à-vis d’un homme armé, tout ça aurait pu se calmer.  Mais personne n’avait idée de ce que pouvait cacher la main de cet homme en furie, et visiblement drogué, car les alcooliques ne parlent pas de cette façon.  Il aurait pu brandir un cutter…perso j’ai tout de suite pensé à ça.

Il a donc fallu du courage pour se mettre devant la jeune femme.

Je viens de voir une courte vidéo montrant une jeune femme russe qui matait un loup menaçant, elle n’y allait pas par quatre chemins, et c’était un peu violent pour le loup (pas de coups de bâtons, elle y allait à mains nues) mais surtout ELLE N’AVAIT PAS PEUR.

Je médite….

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