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Baccalauréat (film de Cristian Mungiu)

Baccalauréat (film de Cristian Mungiu)

Film roumain qui a obtenu le prix de la mise en scène à Cannes 2016.

Un père médecin (Roméo) en Transylvanie, souhaite avant tout offrir à sa fille une chance que lui-même a laissé passer : s’installer en Europe de « l’OUEST ».

J’écris intentionnellement ces mots, Europe de l’Ouest, tellement le film donne l’impression (le décor, la vie quotidienne, les relations entre les personnages) de se situer encore à l’époque maudite des Ceausescu. Les barres d’immeubles pourris où s’entassent les gens, l’administration, la paperasserie, les niveaux de corruption, l’absence de justice, de services publics, la morosité du paysage, et les moyens de locomotion, s’ils ne sont pas exactement semblables, ressemblent quand même beaucoup aux « éléments de paysage » de cette époque, vieille de moins de 30 ans.

Roméo et sa femme (neurasthénique) sont rentrés pleins d’espoir en 1991, après la période communiste, avec l’idée de contribuer à créer un pays nouveau, démocratique, libre…et ils se sont bien entendus fourvoyés, englués dans l’impossibilité matérielle et psychologique de sortir de la torpeur collective par manque de moyens (d’organisation et de solidarité sociale).

Eliza, leur grande fille est une excellente élève mais elle doit absolument dépasser le 18/20 de moyenne au baccalauréat pour accéder à la bourse promise par l’Université de Cambridge.

Or, la veille de l’examen, Eliza est agressée, presque violée, ce qui la handicape fortement pour l’examen.

Le père, pourtant strictement attaché aux valeurs morales, va tout tenter pour essayer de faire accéder Eliza au niveau d’excellence qui aurait été à sa portée sans cet évènement.

Et Roméo est sur le point de sombrer très rapidement vers des compromissions dangereuses qui pourraient bien le faire renier jusqu’à ses engagements de médecin, tellement le poids des mafias est proche, accessible, douloureusement à portée de main, d’âme.

On comprend bien qu’au travers de l’histoire, le réalisateur interroge la fragilité de la morale : chacun tente de s’en sortir tout seul, à tout prix, pour préserver la génération suivante, le rêve qu’on a placé en elle, sans s’apercevoir qu’on circule ainsi sur un fil au-dessus du volcan et qu’on risque alors de transmettre précisément ce qu’on voulait éviter : l’image d’une société sans repères et sans foi, l’exemple de parents sans scrupules, et enfin la paralysie qui nous a déjà frappés et qui pourrait bien contaminer l’innocence, marquer le testament d’ une tache indélébile, l’envoyer à la damnation.

Quelle est l’influence du régime « communiste » sur cette tentation ? Quel degré de désespoir faut-il avoir atteint pour en arriver là ? Comment les âmes peuvent elles se corrompre si facilement ?

Roméo finira, avec l’appui d’Eliza, par se ressaisir, mais c’est dans l’oscillation entre la lumière et les ténèbres qu’il faut situer le récit, comme une traversée du désert, comme le crime initial, comme…un péché « de lassitude » !

J’ai beaucoup aimé le rythme lent, la construction rigoureuse, et le cheminement des personnages vers leurs interrogations, vers leurs doutes et finalement vers leurs vérités.

Baccalauréat (film de Cristian Mungiu)
Baccalauréat (film de Cristian Mungiu)
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C
Jolie critique même si le sujet est difficile, il mérite que l'on s'interroge car il n'y a pas "une" vérité... <br /> J'ai bien envie de voir ce film.
Répondre
C
non, il y a la tienne aussi ma belle!<br />