Les Ondes Magnétiques (David Lescot au théâtre du Vieux Colombier)

En 1981, la gauche arrive au pouvoir en France et c’est la première fois qu’un homme politique de gauche accède à la présidence de la V^e République.

Certains français affolés prédisent déjà le débarquement des chars russes à Paris, ce qui, bien entendu, ne sera pas.

Dès les premières mesures sociales (relèvement de 10 % du SMIC à compter du 1^er juin 1981, du minimum vieillesse, des allocations familiales et de l’allocation logement qui sera de nouveau augmentée au 1^er décembre, abattement de 50% des charges sociales des entreprises pour les très bas salaires, mesures pour l’insertion professionnelle des jeunes et des femmes, aides à l’investissement...), le journal Libération titre : « ils sont osé, les pauvres sont riches », ce qui hélas, ne sera pas le cas.

La télévision ne propose que trois chaînes publiques. Quant à la radio, elle ne compte, hors service public, que les stations "périphériques" – RTL, Europe 1 et RMC –, qui disposent d'un peu plus de liberté, ainsi que des radios en ondes courtes que l'on peut recevoir de l'étranger.

Mais, à partir de 1968, sous l'effet de l'aspiration démocratique à plus de liberté, et des progrès technologiques (la FM qui permet la multiplication des stations de radio) le désir de plus de liberté est dans tous les esprits.

Le principe de la liberté des ondes est dans le programme du candidat Mitterrand. "La communication audiovisuelle est libre", sera l’article 1 d’une loi attendue et publiée fin 1981, inspiré de la loi sur la presse de 1881.

Déjà depuis mai 1981,  les radios pirates foisonnent, et près de 2 000 radios libres sont recensées.

David Lescot explique : « À l’origine je voulais écrire quelque chose sur le début des années 1980 en France. J’avais une somme d’impressions confuses et de souvenirs agréables, ceux de l’enfance. Je voyais les adultes se réjouir du changement qui advenait, moi aussi j’épousais la liesse autour de moi, sans trop rien y comprendre, mais avec ferveur. »

Toutefois, au terme de la récréation (1981-1983), il y eut au bout de trois ans à peine « le tournant de la rigueur », conversion résolue à l’économie de marché, rupture brutale avec les premières mesures politiques prises par la gauche au pouvoir.

David Lescot imagine deux radios libres, « Radio Quoi », qui improvise, avec échelle sur le toit et antenne à la main, sa tentative d’émettre sans être brouillée et à« Radio Vox », qui a profité de la libération des ondes, et qui partage la fréquence avec Radio Quoi. Radio Vox est dirigée par un patron à l’ancienne très centralisateur, déterminé à faire du profit et à bazarder l’idée même de liberté des ondes pour à la fois plus de professionnalisme et de « réalisme ».  

En effet, pour les radios, s’est vite posée la question de la publicité : moyen d’autonomie mais aussi risque de faire entrer l’argent dans la place et de mettre les plus petits à la merci des plus gros.

Dans cette histoire, on voit l’avant- garde jeune et fauchée faire le travail pour les marchands qui finiront par l’emporter.

A la fin du spectacle, dans une fête déjantée, Jacques Higelin, prophétique, chante «  La nuit promet d’être belle… Champagne ! ». La parenthèse des enthousiasmes des radios libre va se fermer sur un goût amer de trahison.

On retrouve dans ce spectacle, la couleur et le « son » de ces années que j’ai eu la chance de connaitre : espoirs insensés, folies joyeuses, nuits troubles….J'ai bien aimé ces retours nostalgiques dans l'atmosphère fiévreuse de ces années d'innocence.

Mise en scène: David Lescot,

Acteurs: Sylvia Bergé Nâzim Boudjenah Claire de La Rüe du Can Jennifer Decker Yoann Gasiorowski Christian Hecq Elsa Lepoivre David Lescot Alexandre Pavloff