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Le Molière Imaginaire (film France 2024)

Le Molière Imaginaire (film France 2024)

Ce film est prétentieux, vaniteux, et même carrément insupportable. Voilà un film à gros budget- du moins en com, car il y a des affiches géantes partout dans le métro et une couverture presse impressionnante-, qui, malgré une distribution avantageuse, est destiné à des gogos.

Molière méritait mille fois mieux.

Le metteur en scène prestigieux qu’est Olivier Py, a mis en scène ses fantasmes, ses délires, et pour le dire plus vite, s’est attaché à se décrire lui-même sous les traits de Molière à son dernier jour. Pas gêné par l’hubris qu’il y a à se comparer à un génie absolu, Olivier Py transforme Molière en homosexuel enfiévré, amoureux d’un mignon de type Henri III (avec perle dans l’oreille et fleurs artificielles en couronne), à qui il jure amour éternel. C’est non seulement ridicule mais aussi abominablement affligeant, tant l’image est outrée…et fausse.

Olivier Py, c’est pourtant une référence absolue, un vrai homme de théâtre, que j’ai admiré comme directeur de l’Odéon ou du Festival d’Avignon. Je ne suis pas encore allée au théâtre du Chatelet où il a été spécialement choisi par la Maire de Paris, mais je pense qu’il y  fait un travail excellent. J’étais même allée le voir dans son tour de chant « Miss Kniffe chante Olivier Py ».

Quelle mouche a bien pu le piquer pour qu’il se lance dans ce film qui aurait eu toutes les fées sur son berceau pour être magique et se transforme en spectacle maniéré, roccocco et convulsif?

Certes, il a choisi un vieux théâtre, de type de celui de Molière, au Palais Royal (actuelle Comédie Française), enfin un théâtre à l’italienne avec une rampe allumée en bougies véritables ("les feux de la rampe"), et des loges où se pressaient les gens importants tandis qu’au parterre, (actuel orchestre) se tenaient debout les hommes du « peuple ». Tout le film est tourné, comme s’il s’agissait d’une pièce de théâtre, dans ce théâtre, ses coulisses, son soubassement, ses corbeilles. Il me semble aussi que les lumières sont toutes indirectes ou issues de bougies, ce qui donne une ambiance sépulcrale au film, ambiance adaptée à l’agonie du grand homme.

Les costumes sont inspirés de costumes d’époque au théâtre, et les tissus chatoient à la lumière vacillante des bougies.

En revanche, les maquillages outrés, faits de perruques invraisemblables et de fards blancs sur des visages grimaçants de vieillards et de femmes édentées, ne nous ramènent pas au XVII° siècle mais plutôt aux déguisements de la gay-pride, contre lesquels je n’ai rien, si ce n’est qu’ils restituent une atmosphère de décadence et de folie qui n’était pas du tout conforme à l’esprit de l’époque de Molière.

La caméra ne fait que s'envoler d'une loge à l'autre, d'un plan à l'autre. C'est ingénieux, mais à la longue, cela finit par donner le tournis.

L’histoire est totalement décousue, bien évidemment, car il n’y a aucune histoire à raconter. Ce qu’Olivier Py a entrepris, c’est la mise en scène de son homosexualité à lui, car bien sûr c’est lui qui joue Molière, accompagnée de phrases profondes extraites, de ça de là, de répliques célèbres des pièces de Molière.

Mais loin de nous faire réfléchir, ces citations, prononcées dans ce monde échevelé, où les acteurs sont plus souvent nus qu’habillés et où les symboles apparaissent comme des éléphants dans une pièce, ces citations donc semblent totalement plaquées, en contradiction totale avec l’ambiance générale.

Alors non, Molière n’est pas mort sur scène dans son fauteuil (LE fauteuil de Molière conservé sous vitre au Français), mais d’une « fluxion de poitrine » (une "pleurésie" ?), qu’il trainait depuis des années et dont il est mort quelques jours après avoir quitté la représentation du Malade Imaginaire.  Non, il n’était pas homosexuel.  Il était plutôt affreusement jaloux d’Armande Bejart qu’il avait épousée 10 ans auparavant, qui le trompait abondamment, et qui était la sœur de Madeleine, ex-compagne de Molière, de 20 ans l’ainée d’Armande, et, elle aussi, actrice fameuse de la troupe. Non, son petit ami n’a jamais été Michel Baron, un de ses acteurs fétiche qui avait 30 ans de moins que Molière et était certes très beau, mais qui a simplement assisté Molière dans ses derniers moments.  Non, la société de Louis XIV n’était pas celle, complètement dégénérée et libertine, de la régence de Louis XV. Non l’ambiance n’était pas à la folie kitch du monde gay, certes très sympathique en soi, mais pas du tout dans l’esprit du temps.

Olivier Py semble s’être inspiré de deux monuments du cinéma, je veux parler d’Amadeus et de Barry Lindon, mais le résultat n’arrive pas au dixième de  la cheville  de l’un ou l’autre de ces chefs d’œuvre.

Bref ce film est totalement raté et on s’y ennuie ferme, sauf si on vénère Olivier Py, sa personne, ses outrances, sa fatuité bien plus que la finesse et la profondeur de Molière. 

Avec Olivier Py, Jeanne Balibar et Laurent Laffitte

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P
Bon....on a compris que vous n'aimez ni le film....ni les éléphants "dans un magasin de porcelaine"..? On ira se faire notre idée tout de même 😉😊
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C
jen'empêche personne, c'est seulement mon point de vue! bon visionnage!
L
Et ben voilà ça c’est dit 😉
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C
oui c'était plus que lunaire, c'était indécent. Tant d'exposition de l'EGO surdimensionné, ça me tape sur les nerfs