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Gargantua

Gargantua

Voilà un spectacle récité par un seul comédien qui est l’exacte antithèse de ma critique de la pièce précédente du Rond-Point de Patricia Allio. Cette fois-ci c’est du théâtre, le comédien ne lit pas, il dit le texte, il le vit, il l’interprète pour nous.

Et le texte, inutile de le préciser, est génial. Dire que Rabelais a écrit cette satire des mœurs de son temps en 1534 soit il y a presque 500 ans et que ce texte nous parle toujours !!!

Le comédien est revêtu d’habits stylisés du XVIe siècle. Il se met dans la peau de ce farceur de Rabelais, qui, rappelons-le, était médecin, ce qui, à l’époque, voulait dire « cultivé », ayant une très bonne connaissance des grands « médecins », philosophes et sages de l’Antiquité, et sachant bien parler latin, grec, etc..

Je ne ferai pas l’injure à mes lecteurs de leur expliquer ce livre d’éducation, d’apprentissage, d’initiation.

Juste se souvenir que Gargantua, géant déjà connu au Moyen Âge, est choisi comme personnage principal pour ce que ses outrances peuvent dénoncer du monde, de la tyrannie intellectuelle qui y est exercée par la Sorbonne (haut lieu du savoir qui tourne sur lui-même), des guerres, des paysages qu’il façonnera malgré lui.

Gargantua n’est pas récité en entier, on s’en doute, seuls des extraits significatifs font l’objet du spectacle, mais ils donnent bien une « overview » de l’ensemble du livre. Qui se divise traditionnellement en 5 parties :

Prologue : c’est là où Rabelais, prévenant, nous incite à tirer la substantifique moelle de son histoire.

La naissance et l’adolescence de Gargantua (chapitres 1 à 13) : Gargantua nait par l’oreille de Gargamelle qui a mis 11 mois pour le concevoir. Pied de nez à la Sorbonne qui raconte des sornettes.

Gargantua met un soin particulier à trouver un bon torche-cul : il développe ainsi sa connaissance détaillée du monde extérieur.

L’éducation médiévale (chapitres 14-15 et 20-22) : Rabelais nous fait rire avec une éducation idiote, basée sur le savoir par cœur et qui ne fait aucunement appel à l’intelligence. Gargantua récite à l’endroit et à l’envers.

Le récit enchâssé : les cloches de Notre-Dame (chapitres 16 à 19), Gargantua arrive à Paris, pisse du haut de Notre-Dame (sur la Sorbonne donc) et y vole les cloches. Les parisiens désorientés lui offrent des centaines de moutons et autres victuailles pour récupérer leurs cloches.

L’éducation humaniste (chapitres 23-24) : Ponocratès est un maitre d’école humaniste et enfin, Gargantua peut être éduqué en homme de la Renaissance. Il discute les enseignements qu’on lui propose et la méthode pour lui faire apprendre les indispensables est de les lui répéter dans différentes circonstances, y compris sur les lieux d’aisance ! Gargantua, tout géant qu’il est, a une soif d’apprendre considérable, à la mesure de sa démesure, et dans tous les domaines. Des apprentissages équilibrés font la part belle aux sciences, aux arts, à la philosophie mais développent également son esprit critique.

Les guerres picrocholines (chapitres 25 à 51) : Voilà que Picochrole, un voisin de Grandgousier, le père de Gargantua, se met dans la tête d’attaquer le château de son voisin ; Gargantua est rappelé chez son père pour chasser l’ennemi. La jument de Gargantua créée des rivières en se soulageant et Gargantua lui-même, par sa présence, modifie le paysage. La guerre est gagnée et, pour s’assurer une paix durable, Gargantua, en homme avisé, prononce une amnistie pour les ennemis.

L’abbaye de Thélème (chapitres 52 à 57) : « Fais ce que voudras », nous dit Frère Jean des Entommeures qui veut construire sur ce principe sa célèbre Abbaye de Thélème.

Les salles du Théâtre de Poche sont, comme son nom l’indique, toutes petites. Ce théâtre créé en 1942, au cœur de la seconde guerre mondiale, est devenu un lieu emblématique de la capitale. Il vient de perdre son directeur depuis une dizaine d’années, Philippe Tesson.

La formule est singulière qui vise à faire connaitre des grands textes en même temps que des mises en scène contemporaines pour un public populaire, dans des salles très petites où justement le texte est servi par des comédiens peu nombreux, mais fantastiques.

Nous lui souhaitons de continuer sur la voie de ce beau succès.

PS : S’agissant de cette pièce pour le texte de Rabelais, ce soir-là, la salle accueillait une classe de lycéens. Mission remplie !

Comédien: Pierre Olivier Mornas

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C
Chi vuole vivere deve combattere
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