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L'homme-chevreuil (Geoffroy Delorme Ed: Les Arènes)

L'homme-chevreuil (Geoffroy Delorme Ed: Les Arènes)

« Si c’est le chevreuil que vous cherchez, je vous dis tout de suite, il est épuisé ». Voilà comment la libraire, s’approchant de nous près de la pile des livres, nous a immédiatement  et très justement "calculés".

Mais c’est dire le succès du livre qui est juste sorti il y a 15 jours ! Je ne sais pas si la promo a visé juste en invitant l’auteur sur les plateaux à très forte audience (Quotidien, la 5 etc..) ou bien s’il s’agit d’un livre vraiment captivant, mais le triomphe est là, c’est indéniable.

Il faut dire que l’expérience vécue par l’auteur est tout à fait singulière puisqu’il a vécu, en quasi autarcie, dans une forêt de l’Eure, et cela pendant sept longues années. Il ne dit rien de vraiment décisif sur les raisons qui l’ont conduit à vivre cette aventure, mais on comprend que les relations avec sa famille devaient être plutôt à l’orage. Et comme cet essai de vie sauvage s’est déroulé à l’entrée de sa vie adulte (de 20 à 27 ans environ), et qu’il a aujourd’hui 37 ans, je présume que, malgré son « alibi » de photographe animalier, ce qu’il cherchait devait s’apparenter à une fuite devant un monde jugé trop contraignant ou trop contraire à ses valeurs.

Toujours est-il qu’il s’agit là, longtemps après, et avec le recul que peuvent donner la maturité et la stabilité, d’un excellent reportage sur la vie des chevreuils, ses animaux favoris, dans ce qu’il nous reste de forêts en France. Encore une fois on s’aperçoit que l’aventure est vraiment au coin de la rue, car comment imaginer qu’on puisse encore vivre de telles expériences inédites en France et de nos jours ?

Ce qui est singulier, c’est tout d'abord de vouloir vivre en autarcie : est ce possible sous nos contrées ? Que manger ? Comment se laver ? Comment dormir ? Le moins qu’on puisse dire c’est que Geoffroy Delorme n’a pas choisi le plus facile. Il dormait à même la terre, sous les écorces et branchages de pins (hiver comme été), il se lavait dans les creux des troncs d’arbres qui recueillent de l’eau de pluie, ou avec de la terre, il mangeait feuilles, fleurs , glands, champignons, noisettes et baies. Parfois il est arrivé à tirer un peu de lait d’une vache, à condition de sortir en lisière de forêt. Il a même réussi à tester le lait d’une femelle chevreuil, ce qui me parait une performance, quand on sait combien ces animaux sont craintifs.

Car l’autre performance, c’est bien d’avoir pu approcher d’aussi près ces chevreuils, de s’être fait adopter par ces bêtes au point de pouvoir les suivre dans leurs déambulations nocturnes et même d’arriver à dormir à leur flanc, certains d’entre eux se risquant à poser leur tête sur ses genoux.

Geoffroy Delorme utilise un vocabulaire technique très précis, en tous les cas inconnu de moi jusqu’à présent. J’ai ainsi appris que les chevreuils ont une « serviette » sur le poitrail, et un « miroir » sur les fesses, qu’il existe des « chevrettes » (on les reconnait notamment au « pinceau » au centre de leur « miroir ») et des « brocards » , et que le cri de ces animaux s’appelle un "aboiement". J’ai appris plein de choses comme la durée de gestation d’une femelle, et le fait que, à la belle saison, l’embryon flotte dans l’utérus pendant plusieurs mois pour que les naissances se déroulent toujours au printemps. J’ai appris que les  bois  des mâles sont très sensibles  lorsqu’ils sont recouverts de « velours » avant que l’hormone de croissance, liée aux rayonnements du soleil, ne vienne accélérer la pousse des bois de l’année suivante et donc provoquer la solidification des bois anciens qui tombent à l’arrivée de la belle saison.

J’ai appris aussi le nom des fleurs sauvages les plus communes dans nos régions : anémone sylvie, achillée millefeuille, lamier jaune, scille penchée etc..

Franchement voilà un livre qui se lit d’une traite …si j’ose dire !

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