Ce cher Martin Winckler qui va encore s'en prendre plein la tête ! Déjà les médecins blogueurs (qui ne sont pas les plus réacs) l'accusent à qui mieux mieux de « marxisme » avancé ! J'imagine le milieu médical plus traditionnel et surtout extrêmement chatouilleux sur ses prérogatives et sur sa préservation ! Ah la belle solidarité de ce milieu à moitié paranoïaque, à moitié sadisant, à moitié hystérique !
Alors de quoi est-il question dans ce livre ?
Eh bien de décrire la réalité tout simplement. Voilà le début : "Choisir d'être médecin, ce n'est pas choisir entre deux spécialités ou deux modes d'exercice, mais d'abord entre deux attitudes, entre deux positions. Celle de "docteur" ou celle de soignant".
Soigner, c’est soulager, rendre plus libre en allégeant la douleur, voire en la supprimant. Soigner c’est partager le savoir, c’est éclairer la personne en anticipant ses questions, c’est aider à guérir, c’est se questionner sur son savoir, c’est enfin être là quand le malade en a besoin, c’est accompagner, c’est aussi permettre au malade de choisir son traitement, l’épauler dans son consentement. Ou l’épauler dans ses choix, afin qu’il puisse affronter, faire face, se battre (ou pas).
Ce n’est pas s’assurer de la soumission du patient, ce dernier reste le capitaine de son destin. Le médecin l’aide en lui éclairant la voie, pas en lui faisant peur ou en le traitant comme un enfant.
Martin Winckler parle de la « bienfaisance » (qui n’est pas seulement de la « non malfaisance », de l’autonomie du patient, de la nécessaire confidentialité, de la non-discrimination, du « souci » (dans le sens : « Je me fais du souci pour vous, je m’inquiète de votre santé, je suis en alerte, je me préoccupe de vous »).
Rien de nouveau dans ces idées, c’est écrit dans le code de déontologie des médecins qui fait partie intégrante du code de la Santé Publique.
Pourquoi ces cris d’orfraies, alors ?
Mais parce que la maltraitance est devenue ordinaire dans ces milieux, et je ne pense pas qu’il n’y ait que des médecins rapaces, avides d’argent, de splendeurs, de pouvoir, pétris de suffisance et de sadisme. Bien sûr que non !
Mais comme je viens de traverser ce que tout le monde redoute, le cancer, j’ai pu, par moi-même découvrir la maltraitance banale dans un contexte particulièrement chargé d’angoisses et de doutes.
Et ce n’est pas vrai de dire que les médecins qui pratiquent cette maltraitance en sont inconscients.
Quand on vous répond que « Vous allez crever , si vous ne vous soumettez pas à tel ou tel traitement », quand on vous dit « Qu’est-ce que ça peut bien faire que vous ayez ou non mal au cul (sic) puisque sans ce traitement vous multipliez vos risques de mourir par 3 », quand on vous affirme : « Si vous ne voulez pas de ceci ou cela, allez-vous faire soigner par les charlatans, moi je n’ai pas le temps »…..C’est quoi au juste que cette façon de s’adresser à quelqu’un qui arrive dans la maladie, sans bien savoir le pourquoi du comment ?
Il a raison, cent fois raison Martin Winckler et ce n’est pas l’omerta qui me rendra la complaisance que j’éprouvais autrefois pour le milieu médical, de façon globale.
Mais c’est vrai aussi qu’il y a encore des soignants, pour être très honnête, heureusement que j’en ai encore rencontré dans mon parcours, des vrais médecins, qui ont encore la CONSCIENCE MEDICALE, le « CARE », la préoccupation de leurs patients, et qui trouvent encore une minute, même quand ils sont débordés, pour donner une adresse, une piste, un avis.
Bien entendu, je ne voudrais voir qu’eux, mais ils sont si peu nombreux, j’en reparlerai…
En attendant, le livre de Martin Winckler m’a aidée à ne plus me sentir seule, à me dire que je n’avais pas rêvé et que la profession de soignant pouvait et devait répondre à quelques exigences qui lui rendrait la profonde estime dont elle bénéficiait….autrefois….quand les médecins étaient encore des anges pour moi….